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Covid-19, passeport immunitaire, utopie ou dystopie ?

Nouveau débat cette semaine de Covid-19, sur la possibilité évoquée par certaines nations de la mise en place de passeports immunitaires qui permettraient la reprise du travail par les personnes immunisées..

L'objectif essentiel est la relance économique nécessaire, tous les secteurs étant touchés par la récession. Cependant, pour l'heure, et c'est l'objet du rappel de l'OMS, il n'existe aucune visibilité sur l'immunité acquise qu'on ait été porteur asymptomatique ou qu'on est développé une affection plus sérieuse. Les anticorps développés protègent-ils ? Aucune certitude sur ce fait et notamment sur la durée de protection. 

 

Devant ce débat prématuré et hypothétique, le benjamin du Conseil d'administration de l'UPGCS, Florent Dartinet s'est laissé aller à songer à ce que pourrait être notre vie dans quelques mois si on mettait en place ce passeport immunitaire et a endossé différents rôles pour témoigner ...sur les problèmes inhérents à cette mise en place. 

 

Si tout ce qui va suivre n'est que fictions, cette anticipation a le mérite de poser des questions de fonds essentielles. 

 

L'UPGCS remercie Florent pour ce travail et lui laisse la parole.  

Passeport immunitaire, utopie ou dystopie selon Florent Dartinet

Les rumeurs courent ces derniers temps. Elles ne courent pas, elles volent. Parmi celles-ci, le passeport immunitaire au Covid-19.

 

Pour les besoins des fictions qui vont suivre, je vais partir du principe qu’une fois atteint et guéri du Covid-19, un individu est immunisé, ce qui n’est pas prouvé. Je ne vais pas dater ces récits, mais il sont suffisamment loin dans le futur pour que l’on ait mis en place ce passeport, et que le Covid soit devenu notre quotidien, la nouvelle norme.

 

Alors, le passeport immunitaire, bonne ou mauvaise idée ?

 

Témoignage 1 :

Le Covid sévit depuis bientôt un an, nous n’en sommes toujours pas sortis.

 

Je ne peux plus travailler depuis la mise en place du passeport immunitaire, car en tant que livreur, une profession pourtant très touchée par les premières vagues de maladies, je ne suis pas encore immunisé. J’ai perdu mon emploi au moment où j’ai reçu le résultat du test.

 

J’enrage, je ne peux plus sortir de chez moi, je ne peux pas travailler, ma petite sœur a besoin de vêtements, mais, en pleine zone à haut risque, aucun magasin ouvert, aucun moyen de s’approvisionner en autre chose que les denrées alimentaires, distribuées par les immunisés.

 

A eux le grand air. Pour l’instant on survit grâce aux paniers repas, mais que se passera-t-il après l’épidémie ?

Sans emplois, sans argent, sans avoir payé le loyer depuis presque un an ? Mais j’ai un plan, j’ai contacté des copains, ils ont récupéré via un livreur qui passe par l’hôpital, du matériel contaminé.

 

A nous la Covid partie ! Après tout, je suis jeune, pour moi ce n’est qu’un rhume ! Il faudra juste que je fasse attention à ne pas contaminer ma mère, avec son asthme, ça ne lui ferait pas du bien…

Témoignage 2 :

Actuellement, je suis à l’hôpital.

 

Oh, pas pour le Covid, non, car je suis immunisé. A vrai dire, je n’ai même pas su que j’étais infecté. Je l’ai su lors de la première campagne de dépistage massif.

Au début, c’était un soulagement ! Je pouvais sortir, je pouvais aller me promener, munis de mon passeport immunitaire, je me voyais maître du monde !

 

Mais depuis que les voisins savent que je suis un immunisé et que je peux travailler en extérieur, j’ai reçu de nombreuses menaces et ait même subi une agression, d’où mon séjour à l’hôpital.

 

Ils sont persuadés que ceux qui ont été atteints sont porteurs à vie et peuvent toujours contaminer les autres. Ils disent qu’il faudrait tous nous cramer, qu’on pollue l’environnement avec nos microbes et qu’on les condamne à être emprisonnés à vie.

 

La police ne fera rien, non, ils sont trop occupés à réprimer les non immunisés qui sortent et les immunisés qui oublient leurs papiers…

 

C’est beaucoup plus efficace, plus rentable, c’est le maître mot. 

Témoignage 3

Depuis que mon patron sait que je suis immunisé, il m’oblige à venir travailler, sinon il me vire.

 

Même pas d’indemnités grâce aux lois de relance économique du gouvernement.

Je pensais pouvoir profiter de mon immunité pour m’occuper de ma famille, que j’aurais le droit d’aller voir ma grand-mère qui est malade chez elle et qui n’a aucune compagnie, mais non, tout mon temps est consacré au travail.

Je bosse dans le bâtiment, je fais des journées de 12h pour remplacer mes deux collègues absents. L’un est à l’hôpital, et ne se remet pas le salaud, bien au chaud dans son lit. 

 

L’autre est non immunisé et non malade. Congé sans soldes pour lui, pour ne pas dire viré, s’il ne revient pas travailler dès que l’alerte covid passe dans le vert.

 

Le pire est que je me suis choppé cette merde de virus il y a 5 semaines, et mon patron ne me croit pas quand je lui dis que je suis épuisé. L’autre jour, je suis tombé dans les pommes en pleine journée, ils ont mis 45 minutes à me trouver, après la pause déjeuner, car, en sous-effectif, personne ne m’avait vu tomber. Le patron m’a retiré une demi-journée de paye pour m’apprendre à faire la sieste pendant le boulot. J’ai eu de la chance, je ne suis pas tombé du haut de l’échafaudage, mais je n’aurais peut-être pas autant de chance la prochaine fois…

Témoignage 4

Mon père est à l’hôpital.

 

Ils refusent de l’intuber, car il est trop vieux. Il va mourir, et le règlement ne m’autorise pas à aller le voir, alors que je suis immunisé.

 

Le personnel me regarde avec tristesse et me dit qu’ils n’ont pas le temps de faire du cas par cas, car ils sont débordés. Je peux juste l’appeler, et attendre en croisant les doigts.

 

Je suis sûr que c’est moi qui lui ait refilé. C’est moi qui allait faire ses courses, et malheureusement, par manque de temps, je n’ai pas pu désinfecter toutes ses affaires avant de les lui apporter.

 

Déjà que je n’ai pas pu manger pendant ma pause. Je n’aurais pas droit à mon congé pour deuil s’il venait à mourir, car nous, les immunisés, sommes les petits soldats chargés de défendre la France et lui faire gagner la guerre économique.

Témoignage 5

Je suis infirmier en réanimation, et je n’en peux plus.

 

Le gouvernement a assez de recul sur cette épidémie pour se permette de doser très finement confinement et déconfinement pour rester au seuil de saturation des hôpitaux. La machine est bien rodée depuis le temps, mais ses soldats sont éreintés.

 

Les bravos à 20h, je t’en foutrais moi, j’en ai rien à faire de ces bravos, qu’on bloque le pays un grand coup pendant six mois, et qu’on fiche cette satanée économie par terre ! Elle a fait quoi pour moi l’économie, à part me voler mes congés, m’obliger à travailler bien plus sans aucune reconnaissance ?

 

 

Et le passeport immunitaire… Celui-ci n’indique que la présence d’anticorps, mais ne montre pas que la personne n’est plus porteuse.

 

Pire, une personne immunisée peut véhiculer le virus sur sa peau, sur ses vêtements, mais au lieu de communiquer efficacement dessus, le gouvernement préfère saccager de plus en plus les droits du travail.

 

Que pensez-vous qu’ils feront quand ils se rendront compte qu’en usant jusqu’à la moëlle 20% de la population, on peut obtenir de bons profits et une pression sociale exceptionnelle ?

 

Vous pensez réellement que les grands patrons vont oublier ça de sitôt ? Le coup porté aux droits du travail est sans précédent, et laissera des séquelles plus longues encore que celles du Covid dans le corps de nos patients…

En résumé, tout ceci n'est que fiction ... mais ?

Ces témoignages sont bien évidement fictifs, et reflètent que mon opinion personnelle sur le sujet.

 

J’ai trouvé qu’incarner mon point de vue par quelques exemples qui, je l’espère, resteront fictifs à tout jamais, était le meilleur moyen pour le partager.

 

Je pense que cette idée de passeport immunitaire est la porte ouverte à des dérives sans précédent. On aura une société scindée en deux, entre les immunisés et les non immunisés, et cet état ne fera qu’aggraver les inégalités sociales au sein de ces populations. 

 

Florent Dartinet pour l'UPGCS 

Pour aller plus loin

Et si nous relisions Le meilleur des mondes ?

Défi, réquisitoire, utopie, ce livre mondialement célèbre, chef-d’œuvre de la littérature d'anticipation,

a fait d'Aldous Huxley l'un des témoins les plus lucides de notre temps.

 

« Aujourd'hui, devait écrire l'auteur près de vingt ans après la parution de son livre, il semble pratiquement possible que cette horreur s'abatte sur nous dans le délai d'un siècle. Du moins, si nous nous abstenons d'ici là de nous faire sauter en miettes... Nous n'avons le choix qu'entre deux solutions : ou bien un certain nombre de totalitarismes nationaux, militarisés, ayant comme racine la terreur de la bombe atomique, et comme conséquence la destruction de la civilisation (ou, si la guerre est limitée, la perpétuation du militarisme) ; ou bien un seul totalitarisme supranational, suscité par le chaos social résultant du progrès technologique. »

 

Bienvenue au Centre d'Incubation et de Conditionnement de Londres-Central.

 

À gauche, les couveuses où l'homme moderne, artificiellement fécondé, attend de rejoindre une société parfaite. À droite : la salle de conditionnement où chaque enfant subit les stimuli qui plus tard feront son bonheur. Tel fœtus sera Alpha – l'élite – tel autre Epsilon – caste inférieure. Miracle technologique : ici commence un monde parfait, biologiquement programmé pour la stabilité éternelle...

 

La visite est à peine terminée que déjà certains ricanent. Se pourrait-il qu'avant l'avènement de l'État Mondial, l'être humain ait été issu d'un père et d'une mère ? Incroyable, dégoûtant... mais vrai. Dans une réserve du Nouveau Mexique, un homme Sauvage a échappé au programme. Bientôt, il devra choisir : intégrer cette nouvelle condition humaine ou persister dans sa démence..

 

Source : https://www.babelio.com/livres/Huxley-Le-meilleur-des-Mondes/620048

 

 

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